Rapport Lescure - Vers une nouvelle taxation
Le volumineux rapport présenté ce matin par Pierre LESCURE au Président de la République, intitulé « Acte II de l'exception culturelle – contribution aux politiques culturelles à l'ère numérique », est extrêmement décevant malgré ses 75 mesures proposées.
Suppression de la HADOPI : l’incitation au piratage massif.
Tout d’abord, l’ancien président de Canal + signe la fin de la lutte contre le téléchargement illégal des œuvres artistiques sur internet. En affirmant vouloir supprimer Hadopi et transférer ses compétences au CSA, la question de la qualité de la lutte contre le piratage se pose. En effet, si le système de réponse graduée d’Hadopi a pu faire ses preuves (seulement 10% de cas de récidive après le premier avertissement de la Haute Autorité), la suppression de celle-ci laisse planer un grave sentiment d’impunité. Si la coupure pendant un mois de l’accès internet et l’amende de 1500 euros pouvaient sembler excessives à certains, la sanction avait un fort effet dissuasif. La proposition de suppression de la Hadopi est d’autant plus surprenante que ce rapport salue le mécanisme de riposte graduée mis en place par la Haute Autorité.
Ce que propose Pierre Lescure est en réalité un véritable appel au piratage massif, dans la droite lignée de la politique laxiste menée par le gouvernement dans l’ensemble des domaines. En suggérant de plafonner les amendes à 60€, il sera demain beaucoup plus rentable de télécharger illégalement et de se faire sanctionner que d’acheter des DVD ou de la musique. Soit on tolère le piratage, soit on défend la création. La première solution est malheureusement le cap fixé par le gouvernement. Il s’agit donc bien d’une incitation claire au piratage.
En réalité, l’abandon d’Hadopi est avant tout une mesure politique, puisque la Haute Autorité fut l’objet de très sévères critiques de la part de la gauche pendant 4 ans. Pierre LESCURE assume d’ailleurs parfaitement cette décision, expliquant que la Haute Autorité était « mal née politiquement ».
Proposition d’une nouvelle taxe sur les appareils connectés : des socialistes drogués aux impôts
Le second point de ce rapport est évidemment la proposition de mise en place d’une nouvelle taxe sur les tablettes, smartphones, smartTV et consoles de jeux vidéo, pouvant aller jusqu’à 5% du prix. Cette taxe, si elle est mise en place, est selon moi dangereuse, puisqu’elle donne le sentiment au consommateur d’avoir payé une sorte de licence globale, un « permis de télécharger illégalement ». Une fois le support acheté, comment justifier cette taxe ? De plus, la question de la répartition des revenus de cette taxe se pose, puisqu’aucune piste claire ne semble être envisagée ; à telle enseigne que la Ministre de la Culture faisant sienne cette idée propose que la taxe « alimente une sorte de compte de soutien des industries créatives ». Bref, aucun contour sérieux n’est tracé. Les socialistes veulent comme d’habitude taxer d’abord et réfléchir ensuite.
Cette possible nouvelle taxe, en contradiction totale avec les engagements du Président de la République – puisqu’il avait assuré qu’il n’y aurait pas de nouvelle taxe en 2014 - s’ajoute par ailleurs à l’éco-taxe et à la TVA à 19,6% sur ses produits. La question de l’attractivité des prix sur des produits de cette valeur se pose alors, les acheteurs français risquant d’être de plus en plus tentés d’aller les acheter à l’étranger.
En réalité, pour lutter contre le piratage et garantir l’exception culturelle, il faudrait revoir la distribution des produits, garantir la diversité des œuvres subventionnées et diminuer les prix des œuvres proposées au public. Qui aujourd’hui peut payer un film 20€ en DVD quand ce même film est disponible gratuitement sur internet ? Qui désire attendre 1 an ou plus pour voir un film diffusé ? Comment justifier que les séries à succès diffusées aux Etats-Unis arrivent en France avec une voire deux saisons de retard ? Ce sont toutes ces questions que ce rapport aurait dû trancher.